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La robe victorienne 1914

Helen McNicoll, La robe victorienne, 1914

Helen McNicoll, The Victorian Dress (La robe victorienne), 1914
Huile sur toile, 108,8 x 94,5 cm
Musée McCord, Montréal

La robe victorienne est une de deux peintures ayant le même sujet et le même titre, réalisées par McNicoll au sommet de sa carrière. Les deux œuvres sont mises en scène dans l’atelier de Londres qu’elle partage avec Dorothea Sharp (1874-1955) où elle a aussi peint The Chintz Sofa (Le divan de chintz), v. 1913. Même si ces images de robe sont différentes dans la composition et les couleurs, elles révèlent toutes deux un intérêt pour l’expression de la féminité – blanche, de classe-moyenne – à travers la mode. 

 

Helen McNicoll, The Victorian Dress (La robe victorienne), v. 1914, huile sur toile, 107,1 x 91,7 cm, Galerie d’art de Hamilton.

La peinture montre une figure féminine solitaire se tenant debout contre le mur de l’atelier; le miroir derrière elle reflète le dos de la modèle, mais guère autre chose. La femme porte un châle rayé très coloré, rose saumon et mauve, drapé sur une robe blanche faite d’une jupe ample à étagements froncés. Les deux œuvres sur le même thème ont été peintes à la veille de la Première Guerre mondiale, mais pourtant cette silhouette était celle qui était en vogue autour du milieu du dix-neuvième siècle, comme en font foi les épaules basses et la taille minuscule de la robe vue dans la deuxième œuvre.

 

Les jupes de cette forme sont devenues populaires avec l’invention de la crinoline cage dans les années 1850, qui, étant légère et flexible, permet aux femmes d’être à la mode tout en étant physiquement mobiles. Les caricaturistes à Londres et à Paris ont beaucoup raillé la frivolité des femmes en crinolines, les représentant coincées dans des embrasures de portes ou tombant des omnibus. Beaucoup de ces caricatures révèlent en fait l’inquiétude contemporaine de l’occupation physique de l’espace public par les femmes, nouvellement permise par la crinoline.

 

Le châle, probablement un cachemire, est aussi démodé que la robe. Le châle de cachemire est fait dans la région du même nom depuis le quinzième siècle et quand l’East India Company commence à les importer au dix-huitième siècle, ils sont devenus des accessoires à la mode en Angleterre et en France. Popularisés par l’Impératrice Joséphine en France, ils servaient fréquemment dans les échanges rituels de marchandises précédant le mariage. Dans la première moitié du dix-neuvième siècle, avant que des imitations bas de gamme, fabriquées en usine, ne transforment le marché, le châle de cachemire signifiait richesse et haut statut, un objet de luxe exhibé sur le corps féminin.

 

La robe victorienne est un commentaire ambigu sur le vêtement et sur la femme qui le porte. Dans ses nombreuses autres représentations, McNicoll revêt les femmes qu’elle peint de robes modernes. Il est possible que cette peinture soit une critique délibérée des lourdes attentes associées à l’expression vestimentaire de la féminité, particulièrement aussi à cause du miroir à l’arrière-plan, avec ses connotations historiques de vanité. McNicoll cherche peut-être à suggérer que la féminité est une performance, une identité que l’on « porte » comme un costume.

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