Premier film interracial et court métrage sur la voile 1963

Joyce Wieland, Premier film interracial et court métrage sur la voile, 1963

Joyce Wieland, First Integrated Film with a Short on Sailing (Premier film interracial et court métrage sur la voile) (détail), 1963
Huile sur toile, 66 x 22,7 cm
Collection particulière

Joyce Wieland, Premier film interracial et court métrage sur la voile, 1963.

Wieland qualifie paradoxalement ce tableau de « film », ou plutôt de deux films. Le long métrage consiste en trois carrés superposés verticalement montrant une Blanche et un Noir qui se fondent dans un baiser, tandis qu’à la base de ces derniers figure le court métrage – une séquence horizontale de petites images illustrant un voilier, des têtes de profil et des phylactères. Les amants rappellent des personnages de bandes dessinées, yeux fermés et lèvres pulpeuses rehaussés de légers coups de pinceau, tandis que de petits cœurs rouges surgissent entre les deux visages. La simplicité et le charme loufoque de cette scène sont néanmoins trompeurs, car il s’agit d’une œuvre complexe sur le plan de l’organisation picturale, qui traite d’un enjeu social majeur.

 

L’observation de cette œuvre rappelle facilement au spectateur des scènes hollywoodiennes de baisers enflammés où la musique s’emballe, la caméra se rapproche et les lèvres des amants se joignent. Le baiser symbolise la réconciliation après un conflit et un désaccord. En 1963, cependant, aucun film ou émission de télévision grand public ne montrait des couples interraciaux dans des élans amoureux, écartant ainsi toute possibilité de dénouement narratif menant à une union interraciale. Le « premier film interracial » de Wieland est une fiction qui n’existe que sous forme picturale, constituant également un rappel du racisme profondément ancré dans la culture pop nord-américaine. Les mots « Oh! Walt! » qui apparaissent dans un phylactère flottant librement dans le panneau horizontal pourraient être une allusion à l’empire du divertissement dirigé par Walt Disney.

 

Le tableau de Wieland est radical sur le plan formel du fait que l’artiste y intègre une forme de séquence et de progression narrative qui se déploie simultanément dans deux directions. L’histoire se lit de haut en bas même si le regard zigzague de gauche à droite. Il s’agit d’images fixes, mais celles-ci sont présentées comme si elles faisaient partie d’un défilement cinématographique multidirectionnel.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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