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Moi-même 1933

Paraskeva Clark, Moi-même, 1933

Paraskeva Clark, Myself (Moi-même), 1933

Huile sur toile, 101,6 x 76,7 cm

Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa

Moi-même, un audacieux autoportrait réalisé pendant sa seconde grossesse, est l’une des œuvres les plus connues de Paraskeva Clark. Peu après son arrivée au Canada, elle est sollicitée pour le vernissage de l’exposition du Groupe des peintres canadiens de novembre 1933. Deux de ses peintures sont retenues, ce qui atteste sa stature comme moderniste et progressiste dans son nouveau pays. Elle conserve ensuite l’autoportrait jusqu’à ce que la Galerie nationale du Canada (aujourd’hui le Musée des beaux-arts du Canada) l’achète en 1974. L’année suivante, l’établissement en fait la couverture du catalogue et l’affiche de l’exposition intitulée Peinture canadienne des années trente, qui rappelle la position de l’artiste dans l’art canadien.

 

Plusieurs auteurs commentent l’assurance qu’exsude le sujet de cette œuvre solidement construite. Appuyée sur une table basse placée devant une porte ouverte et occupant presque toute la hauteur de la toile, Clark paraît beaucoup plus grande que nature. L’effet est d’ailleurs accentué par un certain nombre d’artifices formels, comme la diagonale que forment les panneaux de la porte au dessus de sa tête en s’élevant vers la droite. Son rouge à lèvres caractéristique est la seule teinte vive d’une palette plutôt stricte.

 

Art Canada Institute, Paraskeva Clark, Self Portrait, 1931–32
Paraskeva Clark, Autoportrait, 1931-1932, huile sur carton, 41 x 31 cm, Museum London.
Art Canada Institute, Savely Abramovich Sorine, Portrait of Melita Cholokashvili, 1927
Savely Abramovich Sorine, Portrait of Melita Cholokashvili, 1924, tempera sur carton, 92 x 68 cm, Musée des beaux-arts de Georgie, Tbilisi.

Moi-même est le quatrième autoportrait de Clark connu à ce jour. Les précédents la présentent de trois quarts, l’un se limitant à la tête et l’autre la figurant en buste. Dans la version de 1925, peinte dans la banlieue parisienne de Chatou, l’artiste a souligné la structure géométrique sous-jacente de la tête, comme elle a appris à le faire auprès de son professeur Kouzma Petrov-Vodkine (1878-1939). Dans le deuxième autoportrait, exécuté en 1931 et 1932, elle jette un regard vers un miroir, par dessus son épaule droite. La scène est plus animée et plus flatteuse. Le rideau de couleur sombre à l’arrière-plan met en relief le modelé souple du visage. Elle donnera plus tard ce tableau au peintre Harold Town (1924-1990), en échange du portrait que ce dernier réalise du fils de Clark, Ben.

 

Moi-même est un portrait à mi-corps, de front. Elle porte une tenue à la mode, et sa position ne révèle pas immédiatement sa grossesse. La silhouette n’est pas très marquée. Le tableau est une sorte d’étude de formes dans l’espace, mais c’est également une présentation. Après tout, Clark voulait être actrice et la voici qui fait son entrée sur la scène canadienne de l’art moderne. L’attitude est remarquablement semblable à celle de Melita Cholokashvili dans le portrait qu’en a fait, en 1927, l’artiste Savely Sorine (1878-1953), également émigré de Russie. Il n’est pas certain que Clark ait connu ce portrait, mais Cholokashvili appartient alors au cercle des mannequins russes qui entourent Coco Chanel à Paris. Celle ci, liée aux Ballets russes de Sergei Diaghilev (1872-1929) a conçu les costumes du ballet Le train bleu, donné par la troupe au Théâtre des Champs-Élysées en 1924. Clark adopte ici la pose élégante de Cholokashvili, légèrement inclinée vers l’arrière, un peu de côté, les bras croisés à la taille, comme un mannequin montrant sa « petite robe noire ».

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