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Dans les monts Selkirk, près de Glacier House v.1894

Dans les monts Selkirk, près de Glacier House, v.1894

William Brymner, In the Selkirks near Glacier House (Dans les monts Selkirk, près de Glacier House), v.1894

Huile sur toile, 152,4 x 213,4 cm

Musée Glenbow, Calgary

Entre 1886 et le début des années 1900, William Brymner peint plusieurs paysages de montagne. Le tableau Dans les monts Selkirk, près de Glacier House, v.1894, est représentatif de ce corpus. L’artiste se rend dans les montagnes Rocheuses en 1886, 1892 et 1893. Il fait son premier voyage pour tenter de s’établir comme peintre de paysages montagneux, tandis que son travail est plus tard soutenu par le Chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP). Cette œuvre est une toile exceptionnellement grande pour Brymner. La composition est imaginée pour souligner la hauteur des sommets, qui semblent presque s’appuyer contre le haut du cadre. Les pics en dents de scie sont imposants, mais le peintre les adoucit avec des nuages et les tons gris pâle du ciel font écho à la coloration gris violacé des montagnes. Une rivière traverse le milieu de l’image, attirant l’œil du spectateur vers de petits nuages de fumée qui révèlent la présence d’un train.

 

William Brymner, Mount Cheops from Rogers Pass (Les monts Cheops vus depuis le col Rogers), v.1898, huile sur graphite sur toile, 152,6 x 213,6 cm, The Robert McLaughlin Gallery, Oshawa.

William van Horne, le directeur général du CFCP, estime que les peintures des montagnes Rocheuses peuvent jouer un rôle essentiel dans la promotion de la région et, par extension, du chemin de fer. Il souhaite travailler avec des peintres paysagistes membres de l’Académie royale des arts du Canada (ARC), car il veut que les peintures des montagnes soient exposées dans les salons, les bureaux de compagnies et les domiciles des responsables d’entreprises. Brymner est l’un des nombreux artistes que Van Horne engage pour ce travail; parmi ceux-là, on retrouve Lucius O’Brien (1832-1899) et John Arthur Fraser (1838-1898). Bien que Brymner adhère au projet, il trouve difficile de peindre les montagnes, peut-être en raison de leur échelle. Dans une lettre de 1892 à Van Horne, il écrit : « Cet endroit est aussi beau qu’il peut l’être. Je n’ai jamais rien vu de plus beau de ma vie ni de plus difficile à peindre. J’espère que ce que nous avons fait sera satisfaisant, même si je dois dire que j’ai souvent eu des idées noires. » Le travail de Brymner s’avère manifestement satisfaisant et il créé au moins une vingtaine de paysages de montagne, dont beaucoup ont sans doute été peints à son retour à Montréal à partir des dessins et des esquisses rapportés de ses voyages.

 

De nombreux paysages de montagne de Brymner ont une composition similaire à celle de Dans les monts Selkirk, près de Glacier House. Par exemple, la toile Les monts Ottertail, 1894, est exceptionnellement longue, ce qui permet une vue plus étendue des sommets qui se pressent contre le haut de l’image pour mieux étonner le spectateur, tout comme les montagnes de l’œuvre Dans les monts Selkirk, près de Glacier House. Dans plusieurs autres compositions de même nature, comme Hermit Mountain, Rogers Pass, Selkirk Range (Le mont Hermit, le col Rogers, les monts Selkirk), 1886, et Mount Cheops from Rogers Pass (Les monts Cheops vus depuis le col Rogers), v.1898, les sommets dominent, mais on peut tout de même apercevoir un petit train, une vue des voies ferrées, d’une route, ou encore un petit village ou un camp.

 

Brymner dépeint certaines des montagnes les plus impressionnantes du monde avec des traces d’infrastructures nouvellement construites, rappelant à ses spectateurs que le CFCP et, par extension, les Canadiens ont réussi à traverser les Rocheuses avec une voie ferrée. Ces peintures sont à la fois des paysages d’une beauté naturelle à couper le souffle et des preuves révélatrices des progrès de la colonisation de l’Ouest canadien. Elles ne reconnaissent toutefois pas la violence du colonialisme : elles sont considérées comme les représentations d’un accomplissement national. Des décennies avant que le Groupe des Sept se fasse connaître, Brymner et ses pairs exploraient déjà le paysage canadien comme un thème essentiel à l’édification de la nation par l’art.

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