The Far Shore 1976

Joyce Wieland, The Far Shore, 1976

Joyce Wieland, The Far Shore, 1976
Film 35 mm, couleur, sonore, 105 min
Bibliothèque et Archives Canada, Ottawa

À la sortie du film The Far Shore, les admirateurs des films expérimentaux de Wieland sont surpris par ce mélodrame en costumes d’époque. L’histoire, qui se déroule en 1919 à Toronto et près d’un lac en Ontario, porte sur un peintre inspiré de Tom Thomson (1877-1917) et comprend un ensemble de personnages inventés. Au moment où Wieland entreprend de réaliser ce long métrage, les représentations de la nature sauvage de Thomson et du Groupe des Sept sont déjà mythifiées et institutionnalisées. Dans son film, Wieland propose un récit différent de l’histoire de l’art canadien, non pas en déboulonnant Thomson, mais en le réinventant comme libre penseur et personnage héroïque – en transformant son mythe d’une certaine façon.

 

Art Canada Institute, Joyce Wieland, film still from The Far Shore, 1976
Joyce Wieland, The Far Shore, 1976, film 35 mm, couleur, sonore, 105 min, Bibliothèque et Archives Canada, Ottawa.
Art Canada Institute, Joyce Wieland, film still from The Far Shore, 1976
Dans The Far Shore, 1976, Tom McLoed peint un paysage qui évoque le travail de Tom Thomson.

Et pourtant, le protagoniste principal de The Far Shore n’est pas le personnage inspiré de Thomson, Tom McLeod, mais un personnage féminin totalement fictif, Eulalie de Chicoutimi, qui, déçue par un mari capitaliste cupide, quitte Québec pour s’installer à Toronto, où elle tombe amoureuse de Tom. L’histoire de Wieland en est une d’amour et de tragédie. Il faut toutefois attendre les années 1980 afin que les spécialistes reconnaissent que son utilisation du mélodrame peut être appréciée d’un point de vue féministe.

 

The Far Shore présente le paysage à la fois comme toile de fond, nœud de l’intrigue et d’objet de désir. Les personnages principaux cherchent tous à obtenir quelque chose de la terre, et le film raconte la convergence et l’affrontement de leurs désirs. À la sortie du film, certains spectateurs s’étonnent que Wieland ait pu réaliser un film narratif aussi conventionnel après s’être fait un nom comme cinéaste expérimentale. Pour Wieland, cependant, Rat Life and Diet in North America, 1968, Reason over Passion / La raison avant la passion, 1969, et The Far Shore constituent une trilogie. Ce qui unit ces films est l’importance accordée au paysage. Dans la lignée d’une longue tradition de peintres de paysage, Wieland exprime le pathos authentique qui imprègne notre rencontre avec le monde naturel.

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