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Le pin 1916-1917

Tom Thomson, Le pin, 1916-1917

Tom Thomson, Le pin (The Jack Pine), 1916-1917

Huile sur toile, 127,9 x 139,8 cm

Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa

Art Canada Institute, Tom Thomson, Esquisse pour « Le pin », 1916
Tom Thomson, Esquisse pour « Le pin », 1916, huile sur bois, 21 x 26,7 cm, RiverBrink Art Museum, Queenston (Ontario). Thomson semble peu enclin à créer de grandes toiles à partir de ses esquisses, mais la douzaine de fois qu’il s’y prête, il déploie une habileté consommée à inventer des formes et des couleurs correspondant à la composition d’origine. Le passage d’une esquisse sommaire à une toile merveilleusement équilibrée est une prouesse qui nécessite beaucoup d’imagination et un grand talent.

Le pin est radicalement différent de l’esquisse à l’huile dont il est tiré – plus encore que Vent d’ouest (The West Wind), 1916-1917 – et sans doute le principal candidat au titre de chef-d’œuvre de Thomson. Certains spécialistes pensent que Le vent d’ouest n’est pas achevé, ce que croyait également James MacCallum. Il n’y a pas une telle controverse au sujet du Pin.

 

Bien que Thomson conserve la forme de l’arbre de son esquisse à l’huile, le premier plan est sensiblement plus clair dans la toile. La surface de l’eau, qui dans l’esquisse se compose de matière étalée à la hâte dans des tons gris boueux et gris jaunâtres devant la rive lointaine, se transforme dans le tableau en de longues touches de pigment mauve, bleu et jaune – un peu à la manière de Lawren Harris (1885-1970) et de J. E. H. MacDonald (1873-1932), qui excellent tous deux dans l’application de longs traits de pinceau ininterrompus les uns sur les autres.

 

Cette transformation importante est particulièrement évidente lorsqu’on observe le ciel. Dans l’esquisse, Thomson trace simplement une sorte de tourbillon indéfinissable, laissant délibérément la surface de bois visible par endroits – comme il le fait dans l’esquisse dont est issue Le vent d’ouest. Dans la toile, cependant, et même davantage que pour la surface du lac, il habille le ciel de larges bandes de peinture horizontales. Par de subtiles modulations allant des nuages jaune-vert du coucher de soleil à l’arche bleutée qui apparaît dans la partie supérieure, Thomson crée l’arrière-plan parfait pour le pin et les éléments qui l’entourent.

 

La coloration du bois a changé depuis la fabrication des petits panneaux il y a une centaine d’années. À l’origine, il était beaucoup plus pâle, possiblement même de teinte blanc-jaunâtre clair lorsqu’il s’agit d’essence de bouleau. Au fil du temps, la lente oxydation a donné au bois une riche couleur de miel, conférant ainsi une douce patine au tableau.

 

Ce qui étonne, c’est l’incroyable variété de couleurs utilisées par Thomson pour réaliser Le pin, un éventail que l’on n’observe pas dans l’esquisse : des teintes somptueuses, des effets complémentaires et contrastés d’ombre et de lumière, du proche et du lointain, de l’infime et du grandiose. Même les teintes adoucies de la rive éloignée, comparativement au traitement brut de celles représentées dans Le vent d’ouest, situent Le pin dans cette heure du jour indéterminée, à la fois lumineuse et sombre, qui fascine un autre peintre canadien, J. W. Morrice (1865-1924), comme elle ensorcelle de toute évidence Thomson. Au cours du dernier hiver de sa brève existence, il trouve la manière de créer un art réellement exceptionnel et éternel.

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