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Automne v.1950

Automne, v.1950

Kazuo Nakamura, Autumn (Automne), v.1950
Huile sur panneau dur non altéré
61,1 x 48,3 cm
Musée des beaux-arts de l’Ontario, Toronto

Automne est potentiellement la première nature morte peinte par Kazuo Nakamura. Créée alors qu’il étudie à la Central Technical School (CTS) de Toronto, cette œuvre représente une plante en pot ou un arbre, posé sur une table avec une vue de la forêt derrière. Souvent, les natures mortes jouent le rôle de pont entre le monde fabriqué par l’humain et le monde naturel, tout comme ici, où sont juxtaposées la plante domestique et la forêt sauvage.

 

Comme le veut la tradition de la nature morte, notamment telle qu’elle s’est développée en Europe au dix-septième siècle, Automne de Nakamura marque le passage du temps et agit tel un memento mori. La référence saisonnière du titre et le contraste entre le feuillage des conifères à l’arrière-plan et les branches dénudées de l’arbre en pot au centre de la composition évoquent le cycle de la vie, mais aussi un ordre sous-jacent plus permanent.

 

En fait, une étrange inversion se produit ici : tout comme dans les peintures de Tashme, le chaos apparent du monde naturel dissimule une structure sous-jacente subtile révélée par le motif. Or, la nature morte est une expression beaucoup plus intime de ce thème et reflète les changements survenus dans la vie de Nakamura. Désormais installé à Toronto avec sa famille et se concentrant sur son métier, l’artiste peint Automne comme une sorte de soupir de soulagement, un moment de réflexion paisible. Toutefois, le contraste demeure entre notre réalité manufacturée et la nature, entre l’illusion de perfection brisée par la guerre et ce qu’offre la nature.

 

Paul Cézanne, Maison en Provence, v.1890, huile sur toile, 65,5 x 81,2 cm, Barnes Foundation, Philadelphia.
Kazuo Nakamura, Still-Life (Nature morte), 1959, huile sur carton, 33 x 24,1 cm, collection privée.

La table en bois sur laquelle repose l’arbre fruitier en pot est dessinée selon des lignes de perspective qui conduisent le regard du premier plan vers l’arrière-plan. Cette organisation semble plus contrôlée et mesurée que la forêt derrière ou que les branches de l’arbre en pot qui se croisent au hasard. Pourtant, un motif émerge dans le chaos apparent du feuillage, il est mis en évidence par les coups de pinceau horizontaux très structurés. L’arbre en pot se fond progressivement dans cette masse de feuilles.

 

Sur le plan stylistique, le travail au pinceau à l’arrière-plan rappelle la facture de Paul Cézanne (1839-1906). Dans une lettre du 15 avril 1904, adressée à son confrère français Émile Bernard, Cézanne lui suggère de « traiter la nature au moyen du cylindre, de la sphère et du cône » – en d’autres termes, de se servir de la géométrie pour trouver un ordre dans le monde naturel. Dans Automne, Nakamura adopte la technique typique de Cézanne, celle de jouer entre surface et profondeur, entre planéité et spacialité. Par exemple, il peint les objets comme les fruits, en partie ronds et en partie plats.

 

Automne semble également faire référence aux célèbres peintures d’arbres de Piet Mondrian (1872-1944), une influence que Nakamura reconnaît dans une entrevue de 1979. Par exemple, De grijze boom (Arbre argenté), 1911, de Mondrian, montre un arbre sans feuilles qui se fond progressivement dans l’espace environnant. Cette série d’œuvres linéaires mènent Mondrian à l’abstraction pure dans ses compositions néo-plastiques.

 

Tout au long des années 1950 et jusque dans les années 1960, Nakamura continue à peindre périodiquement des natures mortes, pour aboutir à une intrigante série d’œuvres représentant des objets en miroir, comme Reversed Images (Images inversées), 1965.

 

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