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Ondes infinies 1957

Ondes infinies, 1957

Kazuo Nakamura, Infinite Waves (Ondes infinies), 1957
Huile sur ficelle sur toile
94,1 x 101,7 cm
The Robert McLaughlin Gallery, Oshawa

Ondes infinies est une toile monochrome crème foncé traversée par une série de lignes horizontales très rapprochées. Kazuo Nakamura considère cette œuvre comme sa « peinture la plus extrême ». Les critiques et les historiens s’accordent eux aussi pour dire qu’Ondes infinies, ainsi que les autres tableaux de la série String (Ficelle) créés entre 1955 et 1965, constituent sa production artistique la plus radicale. Par contre, ce sont les paysages qu’il crée à la même période, tels que Lakeside, Summer Morning (Bord de lac, matin d’été), 1961, qui sont les plus populaires auprès du public et des collectionneurs.

 

Ondes infinies s’inspire de la technique de Nakamura qui utilise parfois une ficelle trempée dans l’encre pour réaliser ses dessins, comme on peut par exemple le voir dans Trees (Arbres), 1951. À propos du processus de création d’Ondes infinies, l’artiste déclare : « Dans cette peinture, il s’agit de coller du fil sur la toile, puis de peindre du blanc sur toute la surface et, quand c’est sec, vous y mettez une couleur et à vrai dire, c’est tout. » On ne sait pas exactement combien d’œuvres compte la série Ficelle; Ondes infinies est l’exemple le plus souvent cité et le plus fréquemment reproduit qui figure d’ailleurs sur une photographie bien connue de Nakamura dans son atelier.

 

Kazuo Nakamura, Trees (Arbres), 1951, encre sur papier, 38,1 x 55,9 cm, The Robert McLaughlin Gallery, Oshawa.

Bien que les compositions de Ficelle soient les « plus extrêmes », c’est-à-dire qu’elles réduisent tout en une unité de base – en l’occurrence, les lignes – et adoptent une coloration monochrome quasi uniforme, elles constituent néanmoins un prolongement de son travail antérieur et des paysages qu’il peint parallèlement. Même la couleur des paysages, à la limite du monochrome, est appliquée par petits coups de pinceau uniformes.

 

La signification des peintures Ficelle est ambiguë. Le conservateur Dennis Reid les décrit comme « magnifiquement profondes […] des images expansives, infiniment subtiles […] sans limite de sens ». Rory Hinton a écrit, aussi récemment qu’en 2013, que « lorsque Kazuo Nakamura a eu fini de peindre les toiles de Ficelle [comme Ondes infinies], il a commencé une révolution qui a aboli la ligne de démarcation entre la peinture et la physique ». Bien qu’un peu exagérée, c’est une opinion avec laquelle Nakamura aurait probablement été d’accord. D’ailleurs, lorsque Joan Murray lui demande en 1979 : « Si vous deviez définir votre propre travail, avez-vous l’impression que vous agissiez plutôt comme un peintre scientifique, même à cette époque? », il a répondu : « Je crois que oui. J’ai l’impression qu’en tant que peintre, je pourrais peindre dans le domaine de la physique, par exemple. »

 

Les spéculations quant aux sources d’inspiration spécifiques d’Ondes infinies, et des toiles de Ficelle en général, vont de l’incorporation de la couleur blanche dans le symbolisme japonais, à une réponse aux photographies contemporaines capturant les traces de particules subatomiques, telles que reproduites dans Scientific American. Le conservateur et critique Ihor Holubizky raconte que lors d’une conversation avec Nakamura, l’artiste « a fait part d’une révélation et d’une impression d’affinité en voyant des photographies scientifiques de tracés de particules subatomiques alors qu’il travaillait sur les peintures de Ficelle – le monde de la nature jusqu’alors invisible ». L’utilisation du mot « ondes » dans Ondes infinies pourrait donc faire référence à la physique et à la théorie ondulatoire de la matière proposée pour la première fois en 1924 par Louis de Broglie.

 

Quelle que soit leur origine, ces peintures de Nakamura sont à l’avant-garde d’une mouvance vers la peinture monochrome, rejoignant les rangs des White Paintings (Peintures blanches) de Robert Rauschenberg (1925-2008) et des Achromes de Piero Manzoni (1933-1963).

 

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