En Télécharger le livre Tous les livres d’art Accueil

ImPositions no 1 1977

imPositions no 1, 1977

Suzy Lake, ImPositions no 1, 1977

4 épreuves à la gélatine argentique sur papier baryté, dimensions approximatives de 140 x 300 cm lorsqu’installées

Banque d’art du Conseil des arts du Canada, Ottawa

Le lot d’images ImPositions no1 est une œuvre de la plus vaste série photographique imPOSITIONS, qui met Lake en scène les bras et les jambes liés par une corde, luttant pour se libérer – dans cette déclinaison, elle se tient dans un espace étroit entre deux rangées de casiers d’entreposage, dans le sous-sol de son immeuble d’habitation. Coincé entre les étroites rangées alignant les casiers en bois, le corps de Lake comble le fossé entre la rétention et le confinement. Les casiers étant fermement ancrés et immobiles, le corps de Lake doit se fondre dans l’interstice étroit entre les rangées, un exercice compliqué par le fait qu’elle est attachée.

 

Suzy Lake, Boundaries #2 (Limites no 2), 1985, crayon de couleur et pastel à l’huile, 231,1 x 128,3 cm, Georgia Scherman Projects, Toronto.

Ce qui est particulièrement intéressant dans ImPositions no 1, c’est que Lake a chauffé le film à la bougie et l’a étiré pour créer un effet de distorsion qui amplifie son mouvement et son effort dans les compositions – un traitement qui a été critiqué, comme pour le flou prononcé de Choreographed Puppets (Marionnettes chorégraphiées), 1976-1977, en ce qu’il trahit les prétentions à la pureté formelle de la photographie du temps. Comme pour Marionnettes chorégraphiées, Lake délaisse ici la formation en grille pour mieux présenter les œuvres dans une séquence rythmique permettant d’accroître l’impact émotionnel de sa lutte pour s’échapper.

 

Une œuvre connexe de 1977, Vertical Pull #1 (Traction verticale no 1), comprend des photographies de Lake, attachée à une sangle et en train d’être tirée vers le bas d’un escalier par une personne hors champ – sa collègue, l’artiste Angela Grauerholz (née en 1952), avec qui Lake partage un atelier. La verticalité des images provoque un flou perceptuel qui obscurcit ce qui se passe, Lake descendant les marches d’une photographie à l’autre.

 

Ces œuvres examinent le pouvoir et l’autorité qu’une personne peut exercer sur une autre – ou « [la] situation restrictive d’être suspendue entre des actions ou des décisions qui sont sous le contrôle de quelqu’un d’autre », comme l’explique Lake. Lors de l’exposition au Musée des beaux-arts de l’Ontario en 1978, ces œuvres sont présentées ensemble; dans le dépliant qui accompagne l’événement, Lake écrit: « Nous avons tous (d’une manière ou d’une autre) éprouvé la sensation inquiétante de ne pas savoir où, quand ou comment on se fera couper l’herbe sous le pied. Les contours ne sont pas définis. ImPositions évolue visuellement pour inclure tous ces contours indéfinis. » ImPositions no 1, au moyen de la manipulation du support photographique, aborde les dimensions politiques du contrôle et du confinement.

 

La compréhension de cette démarche est renforcée par le fait que Lake ne se présente pas comme une victime ni dans ImPositions no 1 ni dans Traction verticale no 1, tout comme elle ne l’est pas non plus dans Marionnettes chorégraphiées. Bien qu’elle explore les questions de manipulation et de contrôle, s’appuyant peut-être sur son expérience du mouvement des droits civiques à Détroit et sur ses réflexions sur la libération des femmes, elle est à la fois l’actrice et la productrice de ces séries photographiques. Vues sous cet angle, les œuvres expriment la force. Comme Lake le confie à Robert Enright dans une entrevue : « L’idée de victime est quelque chose que je voulais contourner. J’étais plus intéressée par le thème de l’autonomisation. »

 

Télécharger Télécharger