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Suzy Lake en Gary William Smith 1973-1974

Suzy Lake en Gary William Smith, 1973-1974

Suzy Lake, Suzy Lake as Gary William Smith (Suzy Lake en Gary William Smith), 1973-1974

10 épreuves à la gélatine argentique sur papier baryté, dimensions de l’ensemble : 94 x 67,3 cm

Georgia Scherman Projects, Toronto

Les neuf œuvres qui composent la série Transformations, 1973-1975, de Lake s’ouvrent sur un ensemble d’autoportraits présentés dans une grille. La progression s’opère grâce au montage effectué par l’artiste qui introduit le trait d’un autre visage sur le sien d’une image à l’autre, pour se transformer peu à peu en une autre personne. Suzy Lake en Gary William Smith montre le portrait de Lake métamorphosé image par image en un portrait de Smith – un collègue de Wayne State University à l’époque en visite à Montréal. D’autres interventions graphiques – comme l’ajout d’ombres au marqueur – soulignent les caractéristiques individuelles du portrait de Smith qui remplacent celles de Lake dans les images. Contrairement aux séries photographiques précédentes, dans lesquelles Lake joue avec des variations d’elle-même pour faire valoir son point de vue, ici, elle transforme son portrait progressivement et de manière ludique en celui d’une autre personne.

 

Suzy Lake, Suzy Lake as Françoise Sullivan (Suzy Lake en Françoise Sullivan), 1973-1974 (imprimée en 2012), 6 épreuves à pigments de qualité archive, 182,9 x 208,9 cm, Georgia Sherman Projects, Toronto.

Au milieu de la transition, Lake est encore reconnaissable, mais la moitié inférieure de son visage est remplacée par la barbe de Smith. Bien que la représentation du genre ne soit pas au centre de la réflexion de Lake à l’époque, cette œuvre en particulier peut néanmoins être considérée comme un important jalon féministe de l’histoire de l’art. Par rapport au portrait photographique traditionnel, l’œuvre soulève des questions qui explorent les éléments nuancés du genre, de la transformation, de la performance, de l’analyse minutieuse du soi et de marqueurs flexibles de la formation de l’identité. La transformation de Lake en Smith condense parfaitement la puissance des métamorphoses visuelles de l’artiste – ici, de la femme à l’homme, elle devient méconnaissable à la dernière image, même si le point de départ est un portrait d’elle-même.

 

Pour réaliser la série Transformations, Lake choisit des partenaires (hommes, femmes et un enfant) qui lui ont « appris quelque chose » – des gens qui l’ont influencée dans sa vie – et les images sont une documentation visuelle de l’effet qu’ils ont eu sur elle, de la même façon que nous absorbons les manies de ceux que nous admirons. Les portraits sont tous de très grande taille, un format exceptionnel à l’époque. En procédant avec la photographie analogique, Lake conçoit un montage au pochoir de deux négatifs différents, puis les expose dans une chambre noire. Chaque photographie est un portrait en soi, mais l’ensemble des images documente l’accumulation de nouveaux traits faciaux que Lake superpose sur la photographie initiale d’elle-même.

 

Dans une autre œuvre de la série, Suzy Lake as Françoise Sullivan (Suzy Lake en Françoise Sullivan), 1973-1974 (imprimée en 2012), Lake jette de l’ombre sur les yeux d’abord, puis sur la bouche de l’importante artiste et chorégraphe québécoise Françoise Sullivan (née en 1923). L’œuvre attire l’attention sur la surface photographique, mais aussi sur le processus de création et d’édition des photos – ce qui doit être abandonné et ce qui est conservé par l’artiste.

 

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