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Tanoo, îles de la Reine-Charlotte 1913

Emily Carr, Tanoo, îles de la Reine-Charlotte, 1913

Emily Carr, Tanoo, Q.C.I. (Tanoo, îles de la Reine-Charlotte), 1913

Huile sur toile, 109,2 x 167,7 cm

Collection des archives de la Colombie-Britannique,

Royal B.C. Museum, Victoria

Art Canada Institute, Emily Carr, Carr on the beach at Tanoo, 1912
Carr sur la plage de Tanoo, 1912. Carr utilise des photos et des croquis réalisés lors de son voyage aux Îles de la Reine-Charlotte en 1912 comme source d’inspiration pour des tableaux tels que Tanoo, Îles de la Reine-Charlotte, qu’elle terminera en atelier l’année suivante 

À son retour de France en 1912, Carr se remet à son projet de peindre les villages des Premières Nations de la Colombie-Britannique. Exécuté en 1913, Tanoo, îles de la Reine-Charlotte est une œuvre ambitieuse qui démontre à quel point elle a assimilé la formation reçue en Europe. Les modulations qui parcourent le tableau créent un paysage émouvant et animé qui englobe la plage et les mâts totémiques, jusqu’à la forêt et le ciel sombres. Les contours plats que l’artiste a appris à réaliser en France l’aident à réussir une représentation fidèle, quoique plus grossière, de chaque figure sculptée dans les mâts.

 

En 1912, Carr entreprend une excursion de dessin aux îles de la Reine-Charlotte (maintenant connues sous le nom d’archipel Haïda Gwaii), à l’époque même où les Premières Nations manifestent contre les nouveaux colons qui s’installent de plus en plus loin sur leurs terres ancestrales et contre les graves conséquences économiques et culturelles de cette colonisation sur leur mode de vie. En 1910, la chef gitxsan Gamlakyeltqu de la bande Gitanyow déclare à un représentant du gouvernement :

 

Nous ne pouvons pas subsister dans les réserves qui sont trop petites. Nous ne voulons pas de réserves, nous ne sommes pas fous à ce point. Nous savons que la terre nous appartient et nous la conserverons jusqu’à notre mort. Nos territoires de chasse sont notre banque. Les hommes blancs puisent de l’or dans nos ruisseaux. C’est dur pour nous de ne pouvoir rien faire sur notre terre une fois que nous avons des réserves. Le gouv[ernement] prend la clé de notre banque. En automne, l’ours descend à la rivière et nous ne voulons pas de clôtures pour l’en empêcher parce que c’est là que nous le piégeons.

 

Art Canada Institture, Emily Carr, Totem Poles, Kitseukla, 1912
Emily Carr, Mâts totémiques, Kitseukla, 1912, huile sur toile, 126,8 x 98,4 cm, Vancouver Art Gallery.

Les tableaux de cette époque témoignent du contact de Carr avec le postimpressionnisme. Représentant des villages peuplés aux mâts totémiques intacts, ses compositions sont structurées au moyen de formes audacieuses, de rythme, de coups de pinceau animés et de couleur. Dans Canots de guerre (Alert Bay), 1912, par exemple, deux vaisseaux sculptés et peints de motifs complexes, remontés sur la plage au-dessus de la ligne de marée, dominent la composition, à l’avant-plan du village de Kwakwaka’wakw. Des enfants jouent sur la plage et on distingue au loin une rangée de maisons devant lesquelles se trouvent des mâts totémiques. La touche picturale est énergique et libre, et les formes sont exécutées d’un geste rapide comme dans les tableaux réalisés l’année précédente dans les villages bretons.

 

Peintes en 1912, les œuvres Tanoo, Canot de guerre autochtone et Mâts totémiques, Kitseukla feront partie en 1927 de l’exposition Canadian West Coast Art: Native and Modern avec des tableaux du Groupe des Sept à la Galerie nationale du Canada (aujourd’hui le Musée des beaux-arts du Canada). Mâts totémiques, Kitseukla représente une scène du village de Gitxsan avec des mâts intacts au premier plan devant des maisons et quelques personnages. Dans Tanoo, îles de la Reine-Charlotte, par contre, il n’y a aucun habitant, ce qui est une illustration exacte sur le plan historique, compte tenu des épidémies de variole qui avaient décimé les populations de tous les villages haïdas, sauf deux.

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