L’artiste graphique et écrivain inuit Alootook Ipellie (1951-2007) est le créateur prolifique de caricatures politiques, de séries de bandes-dessinées (telles que « Ice Box (Glacière) » et « Nuna and Vut (Nuna et Vut) »), de dessins d’envergure, de prose et de poésie. Né à Nuvuqquq, sur l’île de Baffin, Ipellie s’installe à Ottawa alors qu’il est encore un jeune homme et devient un grand militant, défenseur de questions sociales, culturelles et politiques touchant l’Inuit Nunangat (la patrie des Inuits au Canada). Son Autoportrait : les dix commandements inversés figure dans son livre Arctic Dreams and Nightmares, 1993. Composé de vingt histoires sur le monde mythologique des Inuits accompagnées de dessins à la plume, il s’agit du tout premier recueil de nouvelles que fait paraître un auteur inuit.

 

Alootook Ipellie, Self-Portrait: Inverse Ten Commandments (Autoportrait : les dix commandements inversés), publié dans le livre du même auteur, Arctic Dreams and Nightmares, 1993
Encre sur carton d’illustration, collection privée. Photographie de Justin Wonnacott, avec l’aimable autorisation de la galerie d’art de l’Université Carleton. Reproduction autorisée.

Dans le livre, le narrateur chaman rencontre cette vision effrayante de lui-même – qui ressemble fortement à Ipellie – incarnée en une figure diabolique aux yeux renversés, aux cheveux noirs étirés telles des tentacules et affublée de minuscules visages hurlants sur le bout des doigts. Cette vision troublante marque son arrivée dans le jardin infernal de Nede (l’anagramme d’Eden), avec les visages grotesques représentent les dix commandements inversés et exhortant « Tu feras » plutôt que « Tu ne feras pas ». Dans le récit, le chaman, découvrant que la croyance chrétienne selon laquelle les personnes de bonne volonté sont envoyées au paradis est fausse, détruit le monstrueux mirage d’un coup de genou à l’aine. Selon la spécialiste Kimberley McMahon-Coleman, par cet acte d’autonomisation, le chaman « s’est sauvé lui-même sans l’intervention de l’Église ou de son ministère ». Ce récit saisissant, qui met en valeur la spiritualité et l’autonomie des Inuits, s’inscrit dans la critique plus large, que fait Ipellie dans Arctic Dreams and Nightmares, de l’impact négatif du christianisme sur la culture inuite.

 

Cette œuvre a été présentée dans l’infolettre de l’IAC « Terrible Beauties: Haunting Canadian Art » [en anglais seulement] du 30 octobre 2020. Lisez l’infolettre complète ici, ou inscrivez-vous pour recevoir nos actualités hebdomadaires sur l’art canadien.

 

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