Comment faire entendre la musique d’une œuvre, comment faire voir son rythme, rendre sensible son mouvement et ses accents? Ces questions trouvent une réponse dans la scène de genre L’enfant au pain, tableau lentement élaboré par le peintre québécois et décorateur d’églises Ozias Leduc (1864-1955). La position courbée du garçon et son geste à la fois détendu et absorbé suggèrent une mélodie sereine, un air qui invite au calme et au rêve. Un mouvement adagio ou lento s’esquisse, propre à laisser vagabonder son imagination.

 

Ozias Leduc, Boy with Bread (L’enfant au pain), 1892–99

Ozias Leduc, L’enfant au pain, 1892-1899
Huile sur toile, 50,7 x 55,7 cm, Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa

La tension entre jeunesse et passage du temps (traces d’usure, repas entamé) est le principal leitmotiv de ce tableau. L’équilibre des œuvres de Leduc repose souvent sur un mouvement de tension. Comme celui-ci l’écrit, en 1943, à son ami et ancien élève Paul-Émile Borduas (1905-1960) : « Ce n’est peut-être pas la mission de l’art de prêcher une morale. Toutefois, fatalement, l’Art enseigne, renseigne. Il est un confesseur d’âmes. Il a aussi, sans doute comme autre attribut d’ordonner en un cosmos, le chaos de l’inconscient. D’un désordre, d’une souffrance, d’un déséquilibre, il conduit à une stabilité, à une harmonie, à une joie! » À l’instar de l’attitude de ce garçon, Leduc rappelle que concentration, contemplation et imagination sont les dispositions utiles pour pénétrer une œuvre afin qu’elle puisse pleinement se faire entendre : en saisissant ses lignes d’ensemble tout en prêtant une attention aux détails.

 

Cette rubrique en vedette est extraite de Ozias Leduc : sa vie et son œuvre par Laurier Lacroix.

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