Claude François dit frère Luc (1614-1685)

Frère Luc (né Claude François), La Sainte Famille à la Huronne, v.1671
Huile sur toile, 121,9 x 106,7 cm
Musée des Ursulines de Québec, Pôle culturel du monastère des Ursulines, Québec
Au cours de son séjour de quinze mois en Nouvelle-France, d’août 1670 à octobre 1671, le frère Luc travaille surtout à la création de grandes compositions d’histoire religieuse dignes d’inspirer la célébration de la foi dans huit églises et chapelles de Québec et de sa région. Son passage inaugure la pratique des grands formats dans les décors des lieux saints québécois. L’œuvre La Sainte Famille à la Huronne est exemplaire du type de compositions baroques conçues par le frère Luc, qui démontre sa capacité à moderniser les thèmes classiques en les adaptant au contexte de réception qui les berce. Ainsi, à Québec, il interprète le thème de la Sainte Famille en abordant la colonisation du territoire et la conversion des Autochtones.


Avec La Sainte Famille à la Huronne, le frère Luc conçoit une allégorie de la protection divine sur une enfant wendat convertie, arborant la médaille ornée d’une croix à la ceinture qu’on donnait aux nouveaux fidèles. Elle rappelle la mission d’enseignement aux jeunes filles des Ursulines de Québec. Dans un décor à moitié fermé par une tenture de velours rouge et s’ouvrant sur un paysage donnant à voir la falaise de Québec, Joseph, Marie, Jésus et la jeune Autochtone composent un quatuor monumental et expressif. La jeune Wendat est accueillie dans sa nouvelle famille, en relation de grande proximité avec le divin, une expérience que la composition de l’œuvre entend recréer pour la personne spectatrice.
Claude François est né à Amiens, en France, en 1614, et aurait bénéficié d’une formation dans l’atelier parisien du peintre baroque Simon Vouet (1590-1649) ainsi qu’à Rome. Fait peintre du roi Louis XIV en 1644, il entre chez les Récollets missionnaires la même année et prononce ses vœux en 1645. Claude François adopte alors le nom de Luc, en référence au patron des peintres, saint Luc l’évangéliste. Au couvent récollet, à Paris, frère Luc a un atelier, pourvu d’élèves et d’assistants. Au printemps 1670, à 56 ans, il s’embarque à destination de la Nouvelle-France avec, dans ses coffres, son matériel d’art et quelques peintures religieuses destinées à orner les églises et les chapelles du Canada.
Comme les œuvres d’art étaient en général importées de France dans la jeune colonie à cette époque, le peintre récollet a contribué à la production québécoise locale. Avec La Sainte Famille à la Huronne et l’Assomption de la Vierge, 1671, le tableau L’ange gardien, 1671, constitue l’un des témoignages les plus accomplis du passage du frère Luc à Québec. Après son retour à Paris, le peintre continuera à recevoir des commandes et à pourvoir en peinture les paroisses de la Nouvelle-France. Sa renommée sera d’ailleurs plus grande au Canada qu’en France.