Millicent Mary Chaplin (1790-1858)

Millicent Mary Chaplin, Chasse à l’orignal et aux cerfs, 1842
Aquarelle sur graphite avec traces de grattage sur papier, 29,8 x 37,6 cm
Bibliothèque et Archives Canada, Ottawa
Millicent Mary Chaplin est une aquarelliste amateur élevée dans l’Angleterre victorienne, qui a contribué à forger l’image de la ville de Québec au dix-neuvième siècle. Femme d’âge mûr, elle arrive dans la capitale au printemps 1838, accompagnant son mari, le lieutenant-colonel Thomas Chaplin, affecté au Bas-Canada à la suite des rébellions des Patriotes de 1837-1838. Pendant les quatre années de son séjour, elle tient à jour un album, à la fois journal personnel et carnet de voyage, qui rassemble quelque 130 aquarelles et dessins.

Dans le lot, près de quatre-vingt-dix aquarelles dépeignent la ville de Québec et ses environs, en des vues panoramiques et paysagistes, des scènes urbaines et figurant des campements autochtones. Trois compositions témoignent d’ailleurs de sa participation à la chasse à l’orignal avec des guides autochtones au lac Saint-Charles, au nord de la ville. Elle s’est même figurée dans l’une d’elles, assise avec une compagne au premier plan.
Sa plus riche contribution tient toutefois dans les images de son environnement immédiat et dans le choix plus personnel de certains sujets, comme en témoigne le dessin de sa maison de la Haute-Ville toujours en place aujourd’hui, Notre maison à Québec, 13 rue Saint-Ursule, de juillet 1838 à septembre 1842, v.1838-1840. Ce dessin s’inscrit dans une séquence de son album plus proche de la vie domestique. Les observations de Chaplin y sont sensibles et soignées, et elle les rend dans un style simple et clair, voire quelque peu naïf dans le traitement de l’échelle des personnages, qui participe à l’équilibre de la composition. Elle représente également son jardin, la cour et la dépendance qui sert d’écurie, et s’intéresse aussi aux points de vue saisis depuis l’intérieur de la maison : la fenêtre de son cabinet de toilette s’ouvre sur un splendide panorama, donnant d’abord sur l’aile Saint-Augustin du couvent des Ursulines et sur les toits de Québec, puis, au loin, sur le fleuve Saint-Laurent et les Laurentides.
La plupart des œuvres de Chaplin sont originales. La dessinatrice a aussi copié des vues de ses confrères paysagistes britanniques, actifs pendant l’été de son arrivée, en 1838, à Québec. Ses emprunts témoignent de l’existence d’une petite communauté informelle portée sur l’art du paysage et identifiée sous le nom de « Groupe de 1838 », auquel se joint Chaplin. La pratique du dessin et de l’aquarelle par les femmes issues d’un milieu aisé et aristocratique est très courante à l’époque. Leur éducation et leur position sociale les encourageaient à consigner dans des carnets de croquis les vues et les scènes auxquelles elles étaient confrontées lors de leurs séjours à l’étranger. La production de Chaplin est en phase avec les travaux d’autres aquarellistes et épouses de militaires hauts gradés comme Elizabeth Frances Hale Amherst (1774-1826) et Katherine Jane Ellice (1812-1864).