En Télécharger le livre Tous les livres d’art Accueil

Zacharie Vincent Telari-o-lin (1815-1886)

Zacharie Vincent Telari-o-lin

Zacharie Vincent Telari-o-lin, Zacharie Vincent et son fils Cyprien, v.1852-1853
Huile sur toile, 48,5 x 41,2 cm
Musée national des beaux-arts du Québec, Québec

Zacharie Vincent Telari-o-lin naît en 1815 dans le village de la Jeune-Lorette (ou Nouvelle-Lorette, aujourd’hui Wendake), situé au nord-ouest de la région de Québec, et grandit dans une famille de chefs respectueux des traditions de la nation. Toute sa vie, il lutte contre le déclin de la culture et de la langue wendat, fragilisées par plus de deux siècles d’occupation européenne et de colonialisme. Sa communauté le surnomme Telari-o-lin, qui signifie « non divisé », expression que ses contemporains interprèteront comme « dernier Huron de race pure ».

 

Zacharie Vincent Telari-o-lin, Autoportrait, v.1875-1878, huile sur toile, 62 x 53 cm, Séminaire de Québec, Musée de la civilisation, Québec.
Ludovic Boney, Parure de traite, 2021, techniques mixtes, 365 x 274 x 114 cm, collection de l’artiste. Vue d’installation dans l’exposition permanente Voix autochtones d’aujourd’hui : savoir, trauma, résilience du Musée McCord Stewart, Montréal, 2021-aujourd’hui.

C’est à ce titre que le peintre Antoine Plamondon (1804-1895) l’invite à poser, à vingt-trois ans, dans un portrait qui perpétue le mythe de la figure primitive de l’Autochtone en voie de disparition. L’œuvre est néanmoins charnière dans la vie de Vincent, qui est initié à la pratique de la peinture par Plamondon et d’autres : « Il devient alors le premier Huron à adopter un médium pictural issu de la tradition occidentale – la peinture dite de “chevalet” – et développe un style où se côtoient tradition académique et quelques maladresses techniques. » Vincent se distingue spécialement dans la pratique de l’autoportrait. Sa composition Zacharie Vincent et son fils Cyprien affirme que sa lignée est, au contraire de ce qu’affirment les stéréotypes du temps, bien vivante.

 

En devenant son propre modèle, Vincent expose une image conforme à son allégeance wendat, qu’il traduit dans un récit pictural identitaire où le moindre détail iconographique revêt une valeur symbolique. Il en est ainsi de la présence de son fils Cyprien dans ses premiers tableaux, digne successeur culturel montrant son appartenance avec l’arc et les flèches qu’il brandit, ainsi que la grande médaille pectorale circulaire en argent, une parure de traite que le sculpteur wendat contemporain Ludovic Boney (né en 1981) réinterprétera au vingt-et-unième siècle, dans l’œuvre Parure de traite, 2021. Ces médailles étaient offertes par la couronne britannique à leurs alliés wendat, que ceux-ci décoraient et réinvestissaient en ornements portés fièrement.

 

Dans ses portraits les plus tardifs, comme Autoportrait, v.1875-1878, tous les attributs – pipe, hache, arc et flèches, wampum, médaillon, bracelet, brassard, médaille de la reine Victoria, coiffe à plumes, cocarde tricolore et croix de Malte – incarnent le passé et le présent de l’histoire du chef wendat, la résilience de sa nation face aux autorités coloniales, en même temps que le métissage résultant à la fois de l’adaptation et de l’acculturation de la communauté wendat. Pour le peintre, le genre de « l’autoportrait lui permet de légitimer son statut social et de se démarquer d’une tradition artisanale anonyme, d’être reconnu comme un artiste dont le travail se définit par une pratique régie non pas uniquement par un savoir-faire technique, mais par un travail intellectuel ». Vincent s’affirme comme un artiste professionnel dans un contexte où sa communauté est surtout reconnue pour son artisanat.

Télécharger Télécharger